Les jambons : mal agir au nom du bien

« Jambon » : définition et caractéristiques

Dans le cadre du présent article, un « jambon » est un individu qui pense, ou du moins prétend, bien agir parce qu’il utilise des principes, étiquetés comme bons, afin d’asservir d’autres personnes. Ainsi, il se revendique comme étant une « élite » parce qu’il impose en toute inhumanité, à savoir sans aucun sentiment pour l’autre, des règles prétendument « humaines ».

Ces règles correspondent à une vision toute relative du bien mais il les présente, par la manipulation ou la force, comme un bien absolu. Les « jambons » invoquent une façade d’altruisme (ils « s’occupent » des autres), tout en étant dans le fond nocifs, de par une absence d’empathie.

L’élite sociale, composée de « jambons »

L’élite sociale a en son sein de nombreux « jambons ». Cette situation est le résultat de plusieurs décennies des pratiques suivantes :

  • Les postes élevés sont pourvus par cooptation : il s’agit d’être recommandé (souvent de façon informelle) par une ou plusieurs personnes déjà en haut de l’échelle sociale.
  • Par intolérance, les « jambons » ne vont coopter ou recruter que des personnes qui pensent comme eux.

Ainsi, les « jambons » se revendiquent comme soudés, solidaires, dans le sens où ils « se tiennent » les uns les autres et n’ont d’opinion que par consensus. Et si jamais un membre se met à penser par lui-même, il sera exclu, ce qui n’a rien de solidaire. On retrouve la dangerosité des « jambons » qui invoquent des valeurs séduisantes pour en faire des principes imposés aux autres et donc pour, de facto, agir brutalement.

L’irresponsabilité des dirigeants actuels consiste souvent à se considérer comme pragmatiques parce qu’ils imposent leur vision en dépit de la souffrance de la population, alors que le pragmatisme impliquerait plutôt de suivre un minimum l’opinion populaire.

Ainsi, trop de dirigeants cherchent à imposer des prétendues valeurs aux fonctionnaires ou aux salariés. Ces derniers, s’ils refusent de se soumettre, ont, au mieux, leur carrière brisée et, au pire, en meurent.

Affaire France Télécom : trois principes toxiques

L’affaire France Télécom, où plus d’une trentaine d’employés se sont suicidés ou ont tenté de se suicider en moins de deux ans (2008 et 2009) [1], est une illustration de toute la toxicité de principes imposés dans le monde du travail, et plus largement dans la société française.

Tout d’abord, l’opposition entre diriger et être expert, si fréquente en termes de carrière, est meurtrière. Les deux devraient aller de pair. Comment peut-on prétendre diriger correctement des travailleurs sans en être un soi-même ? Seul un travailleur peut avoir pleinement conscience de la portée de ses décisions lorsqu’elles concernent le travail d’autrui.

Ensuite, une factualité « terre-à-terre » permet de… nier des réalités, par exemple en affirmant qu’il n’y a pas eu meurtre puisque les salariés se sont suicidés. Pourtant, le harcèlement moral qui existait à France Télécom au moment des faits a poussé au suicide des salariés : une factualité totale impliquerait, au contraire, de parler de meurtres indirects. Les êtres humains ont un psychisme et un cœur, c’est un fait.

Ce déni de vérité existe dans la loi même. La loi n’a rien d’absolu : elle est votée par des députés. Après dix ans de procédures judiciaires, seul un an d’emprisonnement a été requis contre Didier Lombard, l’ex-PDG de France Télécom (le jugement sera rendu le 20 décembre 2019 [2]). Il s’agit de la peine maximale prévue au moment des faits : il est poursuivi « uniquement » pour harcèlement moral, et non pour homicide involontaire [3] ! A titre comparatif, il est rappelé que l’on peut être condamné, en comparution immédiate, à six mois de prison ferme pour avoir volé, par nécessité, de la nourriture valant moins de cinq euros [4]. Une factualité partielle et partiale permet une justice de classe.

Enfin, un autre principe, lié au précédent, est de nature psychiatrique : il consiste à affirmer que les personnes qui font une tentative de suicide ont une fragilité « de naissance ». Cette idée, fausse dans le cas général, fait que l’on ne s’interroge plus sur les causes qui ont engendré ces drames.

Prouver le lien entre suicide et harcèlement moral est un chemin de croix, compte-tenu des raccourcis de pensée fallacieux qui existent de nos jours.

Conclusion

Une bonté réelle consisterait à accepter que l’autre puisse se comporter selon des critères qui lui sont propres, et ce, sans chercher à le stigmatiser, ni à le punir.

Sources

[1] https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/carriere/vie-professionnelle/sante-au-travail/suicides-a-france-telecom-l-article-a-lire-pour-comprendre-pourquoi-orange-se-retrouve-devant-la-justice_3423431.html Suicides à France Télécom : l’article à lire pour comprendre pourquoi Orange se retrouve devant la justice

[2] https://www.france24.com/fr/20190712-proces-france-telecom-entreprises-suicides-didier-lombard-logiques-harcelement Procès de France Télécom : « Il faut accepter des entreprises moins rentables et plus humaines »

[3] https://www.lefigaro.fr/actualite-france/proces-france-telecom-un-an-de-prison-requis-contre-l-ex-pdg-didier-lombard-20190705 Procès France Télécom: un an de prison requis contre l’ex-PDG

[4] https://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/un-homme-prend-six-mois-de-prison-ferme-pour-avoir-vole-un-sandwich-et-du-jus-d-orange_2084267.html Un homme prend six mois de prison ferme pour avoir volé un sandwich et du jus d’orange

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